Le mouvement révolutionnaire s’est construit sur un refoulement : celui du socialisme utopique. Dès la fin du XIXe siècle, les propositions de Fourier, Saint-Simon et Owen ont été écartées par les marxistes car considérées comme non scientifiques. Il est aujourd’hui grand temps d’en revenir à l’enseignement de ces maîtres-rêveurs.
C’est ce à quoi s’emploie Martin Buber dans ce livre inspiré, source de réflexion incontournable sur les socialismes non marxistes. Dans le sillage de Proudhon, Kropotkine et Landauer, il en dégage le principe philosophique : ce n’est pas l’État ou le marché qui fait société, mais bien les structures communautaires de voisinage, de travail et d’entraide, ainsi que leur capacité à s’associer librement. Or une révolution est condamnée à l’échec si elle n’a pas posé au préalable les fondations du monde auquel elle aspire. C’est donc ici et maintenant qu’il faut reconstruire des structures de vie collective où chacun considère autrui comme son égal. Elles seront autant d’îlots de socialisme voués à s’agrandir et à se fédérer, pour aboutir enfin à la communauté des communautés.