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Débat sur l’anarchosyndicalisme à 14H
dimanche 11 juin 2006Rencontre avec des militants du Syndicat Intercorporatif Paris Nord (SIPN) de la CNT-AIT (Section française de l’Association Internationale des Travailleurs, AIT)
La Confédération Nationale du Travail est une organisation anarcho-syndicaliste : c’est la section française de l’A.I.T., c’est-à-dire que se sont les seuls membres français de l’Association Internationale des Travailleurs, laquelle regroupe des sections dans toute l’Europe, mais aussi en Amérique Latine et en Amérique du Nord, ainsi qu’au Japon ou en Afrique.
Il est fondamental de comprendre que l’anarcho-syndicalisme n’est pas une idéologie parmi d’autres, n’est pas un ensemble d’idées toutes faites que l’on cherche à plaquer sur la réalité, mais bien au contraire que la théorie et la pratique anarcho-syndicalistes sont le fruit de l’expérience des luttes de plusieurs générations de femmes et d’hommes dont le but a été, et est toujours, la transformation radicale de la société et des conditions de vie. Au centre même de l’anarcho-syndicalisme, il y a donc le souci constant d’éviter tout écart entre ce qui est dit et ce qui est fait, entre ce qui est vécu et ce qui est pensé. Ni compilation de recettes révolutionnaires, ni idéologie momifiée, l’anarcho-syndicalisme est avant tout vivant et expérimental dans le sens où ce sont les expériences de lutte et de vie et le vécu des militants, qui engendrent la théorie et non l’inverse.
L’anarcho-syndicalisme est donc un mouvement qui part du vécu des personnes et qui a pour objectif de transformer les conditions de vie qui nous sont imposées. Le cri de ralliement des fascistes espagnols pendant la guerre civile était "Viva la muerte" (vive la mort). Pour les cénétistes, c’était, c’est et ce sera toujours "Vive la vie !".
Les Raisons de la colère
Partout, tous les jours, que ce soit sur notre lieu de vie, notre lieu de travail, en discutant avec nos voisins, les raisons de se révolter ne manquent pas :
– Au « sud », les trois quarts de l’humanité souffrent de faim et de guerre dans la plus complète indifférence et le mépris le plus total des élites. Chaque jour, 30 000 enfants meurent de faim.
– Dans nos contrées occidentales, salariés, précaires, chômeurs, étudiants, lycéens, retraités..., sommes tous livrés à la même logique marchande qui impose précarisation, flexibilisation, et nous dépossède totalement de nos vies, de notre liberté d’action. On nous divise en inventant des cloisonnements et des identités imaginaires : jeunes/vieux, français/étrangers, travailleurs/chômeurs... selon la bonne vieille tactique de diviser pour mieux régner. L’individualisme et le communautarisme ne font que renforcer les égoïsmes individuels ou collectifs, au détriment de la solidarité universelle.
Les politiciens continuent de nous bercer d’illusions avec leurs alliés syndicalistes. Ils sont impuissants pour enrayer la destruction de la planète, mais d’ailleurs, le veulent-ils ? Seule importe pour eux la « place » et la compétition électorale. Gouvernements, députés, patrons, syndicalistes, Églises et clergé, institutions représentatives... : tous nous envoient dans le mur. Quant aux déambulateurs de la contestation-spectacle, ils nous rejouent encore la carte « citoyenne » incantant de leurs voeux un État plus social, et un capitalisme à « visage humain ». À chaque élection, les politiciens nous ressortent le mythe que l’État pourrait garantir nos droits, s’il était dirigé par des hommes politiques vertueux. Outre que cette espèce d’oiseau rare n’a jamais été observée sur terre, c’est oublier la nature même de l’État qui est avant tout un outil au service de la classe dirigeante et du capitalisme. Les États, garants de cet ordre économique et autoritaire, n’ont de cesse de contrôler, réprimer, enfermer, écraser... Leurs officines, docilement intégrées (partis, syndicats...), ne sont que la voix de leur maître, et en rien des vecteurs efficaces de transformations sociales.
La société reste donc organisée économiquement sur la propriété privée (ressources naturelles, marchandises, moyens de production, technologies), sur l’échange par l’argent, sur la concurrence et la compétition, sur le profit comme but, sur l’exploitation des femmes, des hommes et des enfants. L’éducation et l’instruction scolaire nient elles aussi la liberté et pratiquent sans vergogne la sélection et l’exclusion sociale (par exemple : l’histoire enseignée est celle du pouvoir). La culture de « masse » et de consommation s’érige comme supplétif au bonheur. La pub nous assomme de slogans : « Consommez, vous serez libre et heureux ! ».
Pourtant, contrairement à ce qu’on voudrait nous faire croire, l’Histoire n’est pas finie. Partout sur la planète, des gens luttent contre l’oppression, et l’émancipation de l’humanité reste à conquérir. Nous ne devons pas douter de nos capacités collectives à transformer ce monde, mais nous ne devons pas reproduire les erreurs du passé. Ce ne sera pas en recréant les mêmes institutions (État, gouvernement, partis politiques, Églises, syndicats…) que nous nous libérerons, mais en développant l’autonomie des exploités et des opprimés. Pour cela, nous pensons que le développement de structures auto-organisées, selon les principes anarchistes, participe à ce mouvement révolutionnaire qui reste à construire.
Loin d’établir un catalogue des méfaits induits par le capitalisme, notre analyse reste globale car nous pensons que toutes les oppressions, qu’elles soient économiques, politiques ou idéologiques, se croisent et se renforcent. Nous voulons contribuer à redonner un sens collectif aux luttes, sortir de l’individualisme pour développer les résistances collectives. Cela passe notamment par la transmission de la mémoire des mouvements sociaux, pour reconstruire l’Utopie d’un projet global, le communisme anarchiste. Comme l’union fait la force, nous nous organisons en un réseau fédéral, qui nous permet d’échanger des analyses et des expériences, et aussi de nous renforcer mutuellement avec ceux qui partagent un point de vue révolutionnaire. Au quotidien, nous prenons part aux luttes contre la domination sous toute ses formes, qu’elle s’exerce sur notre lieu de travail, dans notre cité ou lieu de vie, en utilisant les outils de l’action directe et de la solidarité.
Le SPIN
Syndicat Intercorporatif Paris Nord de la CNT-AIT (Section française de l’Association Internationale des Travailleurs, AIT)