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Prisons - Alors comme ça, l’esclavage a été aboli ?

jeudi 23 mars 2006


Les tenant-e-s de la démocratie représentative usent de violence pour nous effrayer, nous maintenir dans la crainte de violer leurs lois par définition répressives. Qu’ils-elles se dotent d’une telle armada de policiers et gendarmes, sans parler de l’armée, en est une preuve flagrante. Non content-e-s de vouloir contrôler chacun de nos actes, chacune de nos pensées, ce qui est impossible, ils-elles vont jusqu’à tenter de broyer les individu-e-s qu’ils-elles jugent néfastes au bon fonctionnement de la société en les envoyant en taule où ils-elles subissent toutes sortes de tortures physiques et psychologiques.

59 241 détenu-e-s en France au 1er décembre 2005, soit près d’une personne sur mille en prison à ce jour. Ce nombre ne prend pas en compte les personnes placées sous bracelet électronique (1 000) ni celles en « milieu ouvert », c’est-à-dire en sursis ou faisant des travaux d’intérêt général (125 000). Le pourcentage des détentions d’une durée supérieure à 5 ans (35,7 %) montre bien que le seul but de la prison n’est pas de « donner une bonne leçon » à de « mauvais-es » citoyen-ne-s, mais de les couper de la société, de les enfermer et si possible de les exploiter encore et toujours. Environ 1 prisonnier-e sur 2 est sous l’obligation de travailler lors de sa détention [1] pour un salaire de misère (pas plus de 300 euros par mois). Parmi le entreprises qui profitent allégrement de cette main d’oeuvre bon marché (comme d’autres profitent des sans-papier-e-s), on peut citer Sagem, Vuitton, les restaurants Maxim’s etc Il faut noter qu’il n’y a pas de code tu travail en prison, par conséquent pas de contrat...

Ce n’est pas ce qu’on appelle l’esclavage ? [2]

La plupart des incarcéré-e-s vivent dans des conditions sanitaires et de surpopulation qui sont voulues par les systèmes judiciaire et carcéral. Le bruit à toute heure (télé, clés, voix...), le manque d’espace, la nourriture dégueulasse, l’éloignement d’avec les proches, la violence inhérente au lieu, la violence et le mépris des matons surtout, la déprime, la crainte de se retrouver au mitard (cellule d’isolement)... Toutes ces raisons et bien d’autres débouchent sur 3 débuts de grève de la faim par jour, 3 tentatives de suicide, dont une effective tous les 3 jours. S’agissant des détenu-e-s gravement malades, la loi Kouchner de 2002 sur la suspension de peine pour raison médicale est appliquée au compte-goutte. De plus, depuis octobre 2005, les juges sont dans le droit de refuser cette suspension s’ils considèrent que le-la détenu-e- est susceptible de récidiver ou de provoquer des troubles importants à l’ordre public (notion quelque peu floue que chacun-e peut interpréter comme il-elle l’entend)...

De nouvelles prisons sont actuellement agrandies ou construites à la hâte, cela non pour désemplir celles existant déjà mais pour accueillir un nombre de détenu-e-s qui va toujours croissant. Et un grand nombre de personnes vivant ensemble dans des conditions pareilles, cela crée un vivier de révolté-e-s. Il y a régulièrement des mutineries, violemment réprimées ça va sans dire. Alors on isole les détenu-e-s les uns des autres. Il faut surtout éviter la solidarité et l’échange d’informations entre taulard-e-s, qu’ils-elles se contentent du prêche à la télé, pour ceux-celles qui y ont accès. Par exemple, dans la nouvelle prison de Séquedin (qui remplace celle de Loos), les cellules sont individuelles, placées les unes à côté des autres sans vis-à-vis, ceci pour empêcher toute communication entre les détenu-e-s. Ces dernier-e-s sont enfermé-e-s 22 heures sur 24. Cette pratique d’isolement est de plus en plus souvent appliquée dans les prisons françaises comme dans les autres pays (Turquie, Espagne, États-Unis...).

La division entre « catégories » de taulard-e-s va encore plus loin puisqu’on sépare les femmes et les hommes, les mineur-e-s et les majeur-e-s, les sans-papier-e-s et les français-es. D’ici à la fin 2006, le gouvernement prévoit la construction de 7 EPM (établissements pour mineurs) qui viendront s’ajouter aux quartiers pour mineurs et centres fermés existant déjà et permettront d’expérimenter des méthodes de surveillance et de contrôle, les détenu-e-s étant placé-e-s 24h/24 sous l’œil des adultes. Quant aux sans-papier-e-s, privés-e-s de tout droit, dont en premier lieu celui de circuler librement sur le territoire français, ils-elles sont enfermé-e-s dans des centres de rétention en attendant d’être expulsé-e-s. Personne n’est illégal !

Détruisons les prisons pierre par pierre !

Pour ce faire et en attendant d’avoir un stock de lance-flammes, on peut écrire aux détenu-e-s, leur rendre visite, soutenir et participer aux collectifs, feuilles d’info, radios [3] anti-carcéraux...

Dehors, dedans, brisons les murs tou-te-s ensemble !

Notes

[1Voir sur l’obligation à travailler en taule, l’article intitulé « Soutien à Christophe » paru dans La Sociale de novembre 2004.

[2Esclave : personne de condition non libre, considérée comme un instrument économique pouvant être vendu ou acheté, et qui est sous la dépendance d’un maître (Larousse).

[3Notamment « La brèche », tous les 1ers vendredi du mois de 20 h à 21 h sur Radio campus 106,6 FM.