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Femmes et précarité : les chômeurs sont des chômeuses !

juin 2000


Le patriarcat n’a pas attendu le capitalisme pour exister et prospérer. Mais c’est peu dire que ce dernier tire profit de la domination exercée sur les femmes et des discriminations à leur encontre. En mettant en concurrence tous contre tous, le capitalisme utilise tous les facteurs de divisions qui lui sont offerts : nationalité, régularité du séjour pour les sans-papiers, mais aussi le sexe.

Pour les femmes, l’oppression est double, et le chemin jusqu’à l’égalité reste encore bien long. C’est ainsi que les pauvres, de par le monde, sont en majorité des femmes, tout comme les chômeur-se-s ou, phénomène plus récent, les précaires.

La précarité touche davantage les femmes

Le taux de chômage féminin, sur les 15 dernières années est resté globalement une fois et demi plus important que celui des hommes. Il était de 13,8 % contre 10,2 % à la fin 98.

D’autre part, les contrats de travail des femmes sont globalement plus précaires que ceux des hommes. Par exemple, dans la fonction publique (grande employeuse de précaires), 31 % des femmes ne sont pas titulaires de leurs postes contre 23 % des hommes.

La précarité a aussi une autre forme : le temps partiel. Les salarié-e-s à temps partiel sont dans une entreprise celles et ceux qui ont le plus faible taux de salaire horaire, qui ont moins d’avantages sociaux et restent à l’écart des promotions, qui accumulent le moins de points de retraite et d’ancienneté. Ce sont aussi les plus vulnérables aux licenciements. Le temps partiel, s’il est de plus en plus répandu et imposé, est de plus en plus imposé aux femmes : en 1982, 16,4 % des femmes étaient à temps partiel contre seulement 1,9 % des hommes ; en 1998, elles étaient 31,4 % à temps partiel contre seulement 5,6 % des hommes. Elles représentent au total 84 % des salarié-e-s à temps partiel. Et 75 % d’entre elles ne l’ont pas choisi.

Les smicards sont majoritairement des smicardes

On a, dans le domaine de l’inégalité des salaires entre hommes et femmes, la conjugaison de deux phénomènes auxquels s’ajoutent la précarité : le cantonnement des femmes dans des métiers dévalorisés ; l’inégalité salariale à qualification égale. En 1996, un tiers des femmes à temps complet était payée moins de 1,3 fois le S.M.I.C., contre seulement un cinquième des hommes. Les femmes sont surreprésentées dans quelques domaines professionnels, qui sont principalement des postes d’employées (secrétariat, commerce de détail) et/ou de domesticité sociale (nettoyage, enfance, services de restauration et d’hôtellerie, santé, aide sociale). Même dans le secteur associatif, qui échappe en partie à la logique capitaliste, elles n’ont guère le choix qu’entre six secteurs d’activités, qui constituent 60 % de l’emploi associatif féminin. Les professions sont d’ailleurs d’autant plus dévalorisées qu’elles se féminisent. C’est le cas par exemple de l’enseignement primaire, aujourd’hui majoritairement assuré par des femmes.

De plus, même s’il a tendance à se réduire lentement, l’écart salarial entre hommes et femmes, à diplôme et expérience professionnelle égaux, reste très important : 27,2 % en France en 1998.

Dernier fait majeur de ces dernières années : les écarts se creusent maintenant entre une frange de la population féminine qui commence à accéder aux postes à responsabilité et l’immense majorité des femmes, dont la situation s’est aggravée, principalement en raison de l’accroissement de la précarité.

Bertrand DEKONINCK