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Matraquage social généralisé

dimanche 19 octobre 2003


Les derniers mois ont été marqués par un large mouvement de protestation sociale. Les projets de lois sur la décentralisation et sur les retraites ont d’abord mobilisé les personnels de l’Education Nationale. Le mouvement s’est très vite élargi à d’autres secteurs :
hôpitaux, PTT, EDF-GDF, et aussi les transports - SNCF, RATP - malgré la volonté du gouvernement de diviser le mouvement en différant dans le temps la réforme des régimes spéciaux. Tout semblait alors réuni - avec notamment la mobilisation du 13 mai qui a réuni un nombre de manifestant-e-s et des taux de grévistes records - pour que soit reconduite la grève générale interprofessionnelle.

C’était compter sans les efforts conjugués de l’Etat et des différentes directions syndicales pour empêcher l’extension du mouvement. Chacun, à sa façon, a joué sa partition dans l’essoufflement du mouvement et le retour de la paix sociale voulus par le gouvernement. Car outre la trahison prévisible de la CFDT le 15 mai, nous avons eu droit au « Faites ce que je dis, pas ce que je fais » de FO (Blondel recommandant la grève générale après avoir appelé à la reprise du nettoyage à Marseille), à la stratégie d’étalement des journées d’action voulue par la CGT contribuant directement à l’essoufflement du mouvement, à la capitulation de la FSU face aux pressions gouvernementales sur les épreuves du Bac. Il fallait bien ça pour sortir le gouvernement de ce mauvais pas, et rassurer les ténors des partis politiques de gauche qui craignaient déjà qu’une alternative puisse voir le jour sans eux.
Les cheffaillon-ne-s des syndicats locaux n’ont d’ailleurs pas été en reste de crapuleries en tout genre, n’hésitant pas à pousser à la reprise du travail pour cause de mouvement minoritaire, ou à user d’arguments toujours plus fallacieux, tel ce chef de la CGT de Lille annonçant que « la permanence de la lutte ne signifie pas la permanence de la grève ! ». La relève de Thibaut est prête.

L’Etat aussi a déployé son arsenal, en s’appuyant notamment sur des médias aux ordres. Ils se sont fait les relais serviles du gouvernement non seulement dans la défenses de ses réformes, en dressant le secteur privé contre le secteur public et en minimisant l’ampleur de la mobilisation, mais aussi dans son offensive contre le droit de grève en incitant les réactions négatives des usagers contre les grévistes et en exigeant la mise en place de services minimums.
Les semaines de grève, de manifs et d’actions déployées par les nombreux travailleurs et travailleuses déterminé-e-s pour faire vivre et étendre le mouvement par eux-elles mêmes, n’auront donc pas suffi pour faire reculer le gouvernement.

Cet été, la détermination des intermittents du spectacle pour défendre leurs droits a laissé croire à une possible reprise d’un mouvement interprofessionnel à la rentrée. Il n’en est rien, et pourtant l’amertume demeure et les mauvais coups continuent à tomber.

Chacune des réformes du gouvernement vient alimenter un peu plus l’arsenal des armes de destruction massive des patrons dans leur guerre contre les opprimé-e-s. Avec les lois sécuritaires, l’Etat mettait en place l’arsenal législatif nécessaire pour mener la guerre contre les pauvres, criminaliser les récalcitrants, protéger les possédants. Avec les lois anti-sociales sur les retraites, la sécurité sociale, les hôpitaux, le RMA (il s’agit d’inciter au travail les RMIstes tout en versant leur salaire… aux patrons, à qui un-e RMaste reviendra trois fois moins cher qu’un-e smicard-e), la décentralisation, etc, l’Etat veut offrir aux patron-ne-s de nouveaux moyens pour nous exploiter et accroître leurs profits. Avec chaque fois le même schéma : des lois inspirées par le patronat, présentées par les médias bourgeois comme inéluctables et sans discussion possible, et enrobées par les députés en chambre. Patron-ne-s, journalistes et politicien-ne-s se répartissent les tâches, la mécanique étatico-capitaliste est bien huilée. Qu’il soit de droite ou de gauche, l’Etat gère au mieux les intérêts des capitalistes. Il n’y a aucune rupture entre l’Etat UMP et l’Etat PS, juste une continuité libérale. En 2002, Jospin et Chirac signaient à Barcelone un accord européen sur l’allongement de la durée de cotisation de 5 ans. En 2003, Raffarin et Chirac le mettent en oeuvre.

Nous ne pouvons compter que sur nos propres forces auto-organisées pour s’opposer à leurs volontés toujours plus grandes d’assujettir nos vies à leurs délires. Nous devons aussi étendre la lutte aux autres domaines que ceux du monde du travail, afin de faire émerger les conditions de la réalisation d’une société libertaire fondée sur l’entraide, la solidarité et le partage égalitaire des richesses, permettant l’émancipation de tou-te-s à travers des projets librement consentis. Pour ça, nous devons en finir une fois pour toute avec le capitalisme et tout ce qui va avec : salariat, frontières, patriarcat, religions, Etat, armées. De tout ça, on n’en veut pas !