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édito

lundi 21 février 2011


C’est toujours le bon moment de
se révolter ! Les peuples de Tunisie et
d’Égypte, grâce à des mouvements
forts qui se sont inscrits dans la durée,
ont réussi à obtenir le départ de leurs
dictateurs respectifs. Voilà qui
n’arrange pas nos dirigeants-es qui les
appréciaient bien et les ont soutenu le
plus longtemps possible à l’image
d’Alliot-Marie allant jusqu’à proposer
publiquement à Ben Ali l’aide de la
France pour le maintien de l’ordre en
Tunisie. Bien sûr, cette victoire n’est
qu’un début, et la lutte doit continuer.
Car quelles que soient les "nouvelles"
figures qui vont être installées à la tête
de ces États devenus "démocratiques",
elles n’agiront en faveur du peuple que
sous la contrainte. En 1936 par
exemple, le Front Populaire en France,
pourtant vainqueur des élections, n’a
mis en place ses mesures sociales
rapidement que sous la pression d’un
mouvement de grève massif. C’est le
moment pour les tunisiens-ennes et les
égyptiens-ennes de profiter du rapport
de force favorable qu’ils et elles ont
instauré pour arracher tout ce qui peut
l’être.

Il faut à nouveau saluer leur
détermination et puiser dans ces
victoires des espoirs et des
enseignements. Il est rassurant de voir
qu’aussi forte que puisse être la
répression, et aussi inébranlable que
puisse sembler un régime, celui-ci ne
peut résister plus de quelques
semaines à un peuple en colère qui
prend et qui tient la rue. C’est
d’ailleurs ce qui nous invite à
relativiser, sans les nier, les craintes
que suscitent en France la LOPPSI 2.
Certes, les nouvelles dispositions de
cette loi doivent en pratique rendre
encore plus difficiles nos vies et nos
luttes. Mais il n’est pas d’application
d’une loi qui ne puisse être contrée par
une organisation et mobilisation
suffisamment fortes. C’est pourquoi
nous appelons à ce que les différents
collectifs anti-loppsi qui se sont
formés un peu partout en France
donnent une suite concrète à leur
mobilisation contre la loi. Par exemple
en rejoignant ou en créant des
collectifs pour lutter contre les
expulsions et la répression policière.

Ce qui s’est passé en Tunisie
puis en Égypte ne doit pas non plus
nous faire croire qu’il suffit d’attendre
la prochaine "grande mobilisation", la
"bonne", celle dont l’État "ne se
remettrait pas" ! D’abord, parce que
la répression n’est pas son seul outil :
il a depuis longtemps appris à susciter
l’adhésion d’un grand nombre, à
distribuer les carottes et pas
seulement les coups de bâton. Il a
identifié que dans certains cas il est
plus efficace de faire passer - en
endormissant, leurrant et corrompant
ses victimes - pour "acceptables" voire
"désirables" des situations pourtant
catastrophiques et nuisibles. Que ce
soit la présence d’une centrale
nucléaire dans le voisinage ou les
systèmes politiques et économiques
actuels. Ensuite, parce qu’une
révolution sociale qui réussirait à nous
débarrasser de toutes les formes
d’exploitation économique ne
garantirait pas la fin de toutes les
dominations. Le patriarcat et le
racisme notamment ne s’arrêteront
pas avec la chute du capitalisme,
même s’il les favorise, et nécessitent
d’être combattus dès maintenant, et
avec la même rage !

L’ampleur de la tâche ne doit
pas nous décourager. Qui aurait cru il
y a seulement un an que les Tunisiennes
et les Égyptien-nes tomberaient
leurs dictateurs en 2011 ? L’heure est
à l’espoir, construisons nos futures
victoires !