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Retour sur le Camp NoBorder de Bruxelles

lundi 21 février 2011


Du 25 septembre au 3 octobre 2010
s’est tenu dans Bruxelles un camp No Border.
Les camps NoBorder se tiennent le plus souvent
à proximité des points de passage des
frontières : Calais vers l’Angleterre, Lesbos
vers l’Europe, la frontière entre le Mexique et
les États-Unis, etc. Cette fois-ci c’était dans
une “capitale” de l’Union Européenne, là où se
construisent et se décident de manière centralisée
la fermeture et la militarisation des frontières.
Pendant une semaine c’est jusqu’à 1000
personnes qui sont venues de toute l’Europe et
d’au-delà pour lutter contre les frontières,
pour la liberté de circulation et d’installation.
Et même si l’étiquette politique n’était pas demandée
à l’entrée, il n’est probablement pas
abusif de dire qu’il s’agissait d’un des plus
grands rassemblements d’anarchistes actuels,
en dehors des contre-sommets, dont le camp
se différencie aussi en ce qu’il ne se cale pas
sur l’agenda des puissants.

Informations & actions contre les frontières

Au cours de la semaine les différentes
déclinaisons thématiques des luttes contre les
frontières ont été discutées : politiques migratoires
européennes & militarisation des frontières,
centres de rétention & déportations,
capitalisme & migrations, clandestinité &
luttes des migrants, extensions des politiques
frontalières européennes...

L’activité du camp a aussi été rythmée
par les actions annoncées ou secrètes contre
les frontières. Parmi beaucoup d’autres :
manifestation contre un centre de rétention le
26/09, tour d’information sur "Bruxelles sanspapiers"
(tribunaux, office du droit d’asile,
églises occupées, etc.) le 27/09, manifestation
d’information au quartier le 28/09. Le 29/09,
participation à la manifestation contre les politiques
d’austérité organisée par les syndicats
européens et blocage d’une réunion de Frontex,
l’agence européenne en charge de la militarisation
des frontières ; le 01/10, action de
souillage du siège de Sodexo Bruxelles - l’une
des nombreuses entreprises qui font leur
beurre sur la "machine à expulser" - et tentative
de manifestation non-déclarée le soir, puis
attaque d’un commissariat pour protester
contre sa répression insensée. Pour finir, la
grande manifestation NoBorder du 02/10 a
rassemblé au moins 1300 personnes dans le
centre-ville de Bruxelles.

Le masque de la “démocratie” est encore tombé, son visage est hideux

Comme c’est le cas à chaque fois que se
rassemblent des contestataires plus ou moins
radicaux des politiques étatiques, la répression
a été violente. Les chevaux qui chargent
et blessent dès la première manifestation
contre le centre de rétention, les barbelés qui
ferment des bâtiments publics dans la ville, la
matraque bien sûr, les violences lors des arrestations
et dans les commissariats et en
permanence la certitude de l’arbitraire, les brimades,
insultes sexistes, homophobes et racistes,
les intimidations... C’est une bonne
leçon d’internationalisme : les flics belges, réputés
plus “tranquilles”, sont bien les mêmes
qu’ailleurs ! S’ajoute à ça l’usage de la détention
préventive - au "bon" vouloir d’une police
haineuse - tout au long de la semaine pour empêcher
des centaines de personnes de rejoindre
manifestations et actions. C’est même
une véritable police de la pensée qui réprime,
et qui tente de nous interdire de participer à la
manifestation contre "l’austérité" sous prétexte
qu’une banderole contenant un A cerclé. “C’est contre la démocratie” est l’argument minable
d’une génération de flics qui prétend défendre
une démocratie pour laquelle elle n’a
eu ni à se battre, ni à comprendre son origine.
Le même jour c’est une autre leçon que nous
avons reçue lorsque nous avons été arrêté-e-s
sans raison, en masse et violemment, au sein même
de ladite manifestation syndicale : des
milliers de personnes (des syndiqué-e-s !) de
toute l’Europe sont passées à côté de nous
sans protester, obéissant sagement aux petits
cadres syndicaux qui leur demandaient de ne
pas se préoccuper de la répression des militants
No Border.

Autogestion pour l’abolition des frontières

Le fonctionnement autogestionnaire du
camp a été excellent, c’est la peine de le souligner.
En plus de la constitution en équipes (logistique,
communication, juridique, etc.) il
s’est organisé partiellement en “barrios”,
c’est à dire en regroupements à l’initiative des
participant-e-s selon la localisation dans le
camp, les affinités ou selon des thèmes comme
les véhicules, le féminisme...`

Une préparation débutée bien en
amont et profitant de l’expérience et des
contacts pris lors du camp NoBorder de Calais
en 2009 a permis de tirer parti des structures
déjà existantes à Bruxelles et ailleurs : indymedia,
squats, cinéma, salles de spectacle, organisations
de sans-papier-e-s ou qui
soutiennent leurs luttes, radios en continu sur
internet et lors d’émissions sur les ondes à
Bruxelles et à Paris, journal (Le Nomade, créé
pour le camp NoBorder de Calais, a reparu !)...

La construction progressive d’un réseau

NoBorder est toujours présenté comme
le “réseau” NoBorder, composé de collectifs
locaux en réseau tout autour du monde. Mais
comme pour le réseau Indymedia, la force des
liens entre collectifs est très variable et
d’autres collectifs sans l’étiquette "NoBorder"
sont parfois plus proches. Mais le principe
reste que lorsque des structures spécialisées
existent il est plus facile de mobiliser rapidement.
On en a eu l’illustration à l’automne
2009 lorsqu’un charter conjoint parti d’Angleterre
devait passer par l’aéroport proche de
Lille pour finir de se remplir avant de repartir
vers l’Afghanistan. Les informations, issues du
réseau Noborder britannique, étaient alors arrivées suffisamment rapidement aux groupes
qui avaient organisé le camp Noborder de
Calais l’été préçédent pour que des rassemblements
à l’aéroport et des communiqués contribuent
à faire annuler le passage par l’aéroport
de Lille.

Avec un réseau NoBorder britannique
fonctionnel depuis des années, des collectifs à
Lille et Calais, probablement un à Bruxelles
suite au camp, sans compter tous les collectifs
plus ou moins informels qui luttent contre les
frontières et les centres de rétention, c’est
une force d’action importante et radicale qui
se met en place dans cette zone pleine de
frontières à abattre !

Pour agir, pour en savoir plus : le collectif
NoBorder Lille organise régulièrement
des actions. Il faut également aller à Calais,
où des militant-e-s luttent au quotidien contre
les frontières et pour la liberté de circulation
et d’installation !