Organisé par des militantEs françaisES, belges et britanniques, le camp NoBorder a réuni jusqu’à 500 personnes à Calais fin juin. Pour le collectif organisateur, il s’agissait de faire parler au maximum de la situation des réfugiéEs à Calais, de faire progresser le mot d’ordre de liberté de circulation et d’installation, et de mobiliser durablement des militantEs sur ce sujet à Calais.
Les flics, encore et toujours
L’organisation et la mobilisation pour le camp ont été très perturbéEs par une présence policière inouïe : on a parlé de plus de 3.000 flics et bidasses en tous genres, munis de leur impressionnant attirail de guerre. Les participantEs ont été systématiquement contrôléEs et fouilléEs aux abords du camp, souvent à plusieurs reprises. Tout déplacement hors du camp était hyper surveillé, et beaucoup se sont retrouvéEs immobiliséEs sans raison par les flics pendant des heures juste pour s’être trouvéEs dans la rue. Il fallait absolument justifier le déploiement sécuritaire et la propagande médiatique nous annonçant comme une nuée de criquets venue ravager la ville. Alors, toute distribution de tracts en ville devenait une course-poursuite, et l’une d’entre elles s’est conclue par un procès (audience reportée en février, l’accusation ayant eu peur du ridicule). La manif prévue le samedi 27 juin s’est retrouvée prisonnière d’un incroyable tracé imposé par la préfecture, qui cantonnait le défilé à de grands boulevards déserts et les occasions de croiser des CalaisienNEs y ont été bien rares. D’ailleurs les flics ont empêché des réfugiéEs et des habitantEs de Calais d’y participer, ce que la presse a traduit par :”Les réfugiés ne se sentent pas concernés par la manif des NoBorder”.
La répression autour du camp n’a donc permis qu’une activité “publique” limitée, et les actions directes préparées n’ont guère pu avoir lieu. Un groupe de militantEs a quand même réussi à surprendre les bleus en bloquant pendant quelques heures au petit matin le centre de rétention de Lille-Lesquin ; un autre camarade s’est collé les mains aux portes de la mairie avec l’inscription “Bouchart, des douches pour les migrants !” dans le dos, d’autres ont brièvement bloqué l’autoroute. Du coup, l’activité des personnes présentes s’est un peu repliée sur l’intérieur du camp et sur le contact avec les réfugiéEs de Calais. Différents ateliers ont été organisés en plusieurs langues, des films ont été projetés (documentaires sur les migrations, films réalisés dans les pays d’origine des migrantEs). Nous avons réussi à nouer de vrais liens avec les réfugiéEs qui ont partagé nos repas et nos discussions, mais aussi avec de nombreuseux habitantEs du quartier. Beaucoup ont vite laissé tomber leurs préjugés sur les migrantEs et rejeté le baratin médiatique pour passer du temps en notre compagnie et découvrir que l’Autre n’est pas toujours celui que le pouvoir nous décrit.
Le début d’une mobilisation
Au-delà de ces rencontres enrichissantes, le Camp a été l’occasion pour beaucoup de venir à Calais pour la première fois et d’y découvrir la réalité : des centaines de réfugiéEs vivant dans des conditions plus que sordides, un harcèlement constant et particulièrement violent du pouvoir et de sa police, pas grand monde pour lutter contre cette répression, tant sur le terrain que de manière plus “politique”. Et comme promis (contrairement à ce que beaucoup annonçaient), le réseau NoBorder ne s’est pas volatilisé de Calais une fois le camp remballé.
Plusieurs réunions internationales ont eu lieu depuis début juillet, et des militantEs sont présentEs en pemanence sur le terrain depuis. D’abord au camping puis dans un local (toujours disponible), les militantEs NoBorder de toute l’Europe ont continué depuis 5 mois à soutenir les migrantEs dans leur volonté de vivre correctement à Calais en attendant de franchir la Manche, à surveiller les agissements des flics (et souvent à les empêcher), à essayer de travailler à la fois avec les associations locales et avec les militantEs plus éloignéEs, notamment en informant sur l’évolution de la situation sur place. L’organisation du Camp a eu une résonnance très importante en France et internationalement : en Grande-Bretagne, presonne ne parlait de Calais auparavant, aujourd’hui le sujet est sur toutes les lèvres.
Diverses actions ont eu lieu : intervention auprès de Natacha Bouchart (maire de Calais) le soir du 14 juillet, affichages en ville, intervention pendant la commémoration de la libération de Calais, banderoles sur les autoroutes, cadenassage du portail du centre de rétention de Coquelles, et d’autres...
Un rapport de force inégal
La mobilisation de NoBorder n’a pas réussi à entraîner beaucoup de CalaisienNEs dans son sillage, et le rapport de force reste très inégal. Pendant toute cette période, le pouvoir a tenu bon dans ses positions fascisantes : harcèlement des migrantEs, aucune concession pour l’hygiène ou la santé, expulsions de squats et destruction des affaires... jusqu’à l’évacuation médiatique de la “jungle” des pachtounes et des autres “jungles” plus petites.
Les militantEs présentEs n’ont pas pu faire beaucoup plus que photographier, filmer, gueuler, transmettre l’info et aider matériellement les victimes de la répression.
Ce passage d’informations a permis de maintenir informées les personnes intéressées dans toute l’Europe, mais également d’élargir la mobilisation. Les manifestations à Lille-Lesquin les mardi 6 et 20 octobre, organisées en urgence contre l’annonce de charters franco-britanniques vers l’Afghanistan, ont été des succès numériques et médiatiques. S’ils ont fait entendre la voix de celles et ceux qui luttent contre toutes les expulsions et pour la liberté de circulation et d’installation, ces rassemblements n’ont pas pu empêcher le décollage du premier charter franco-britannique vers Kaboul depuis Roissy.
Et ensuite ?
Aujourd’hui le mouvement continue à s’élargir, suite à ce qui n’était qu’une étape dans l’internationalisation de la lutte contre les frontières. En Belgique, les centres fermés de Vottem, Merksplas et Bruges ont été bloqués simultanément le 31 octobre, et les locaux d’une entreprise participant à la construction d’un centre ont été mis à sac une semaine plus tôt. Le 28 novembre, un rassemblement aura lieu à Calais pour traverser la Manche en ferry et manifester devant le centre conjoint de renseignement opérationnel franco-britannique de Folkestone, qui vient d’être inauguré.
La semaine qui suit, des rassemblements et actions de protestation auront lieu à Bruxelles pendant la réunion des ministres de l’intérieur et de la justice de l’Union Européenne (30 novembre et 1er décembre) qui présenteront le “Programme de Stockholm” concernant les politiques de fermeture de l’Europe, élaboré sur la base de rapports préparés par l’agence européenne xénophobe Frontex.
Encore une fois, nous appelons chacun et chacune à s’informer sur la situation à Calais, à s’y rendre pour aider les militantEs sur place et à lutter sur tous les fronts contre les politiques migratoires !
plus d’info : http://lille.indymedia.org
http://calaismigrantsolidarity.word...
contact sur place : 06-34-81-07-10