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Police partout

samedi 21 novembre 2009


La nature de la police (l’arme de l’Etat pour exécuter le "monopole de la violence physique légitime") en fait un refuge attirant pour les brutasses de toutes sortes, et autres fascistes qui rêvent d’en découdre avec les feignasses que nous sommes, avec les étrangerEs et autres non conformes à l’idée qu’illes se font d’un individu "normal" et respectueux de la société. La récente affaire de transmission d’infos entre la police et la maison flamande suite à la manif du 23 mai n’en est qu’un indice de plus. Dans la bouche d’un flic, société signifie en fait Etat, et la morale est remplacée par la loi et son application, les circulaires et les ordres.

Inutile de discuter avec un flic de la nature de sa fonction, le bourrage de crânes est tel qu’on tournera vite en rond : une pomme n’est pas un fruit mais un projectile  ; la morale n’existe pas, elle se confond avec la loi ; la loi ce sont les ordres ; les suspects et les coupables, c’est pareil (voir les affaires de fichage). Les mots d’ordre "Crosse en l’air et rompons les rangs" et autres "La police avec nous" sont aujourd’hui ridicules face à la force du décervelage subi par ceux et celles chargéEs de nous surveiller.

L’ennemi principal ?

Les flics, les bidasses et les matons ne seront jamais des travailleurs et travailleuses comme les autres. Mais la police n’est pas L’Ennemi : elle est un instrument de l’Etat, un outil, un obstacle placé pour entraver nos luttes.

La police n’est pas un corps autonome. Sa fonction première et officielle est de protéger les institutions (l’Etat, la propriété privée). Elle en a bien d’autres, et celle qui nous intéresse ici, c’est son rôle de "gestion" des mouvements de révolte. Enquêtes et fichages – sous contrôle des juges ou des politiques -, répression des mouvements sociaux, expulsion des squatter-euse-s, des sans-papier-e-s, etc.

Dans toutes ces opérations, les forces de répression agissent de manière plus ou moins dégueulasse (souvent plus !), les "fonctionnaires" laissent souvent leurs penchants racistes, sexistes et homophobes prendre le dessus. Ces attitudes, qui visent souvent simplement à nous impressionner en faisant montre d’agressivité, ne devraient pas suffire à nous faire craindre la police. C’est là sa fonction essentielle face aux militantEs : intimider, faire peur pour briser toute initiative. En insinuant en nous l’impression d’être sans cesse fichéEs, surveilléEs, de risquer d’être arrêtéEs ou victimes de "bavures", l’objectif est de nous paralyser. Et ça marche : l’énorme dispositif militaro-policier contre le camp NoBorder entravait la moindre diffusion de tracts en centre-ville de Calais. Le risque de répression démesurée a fait se replier les participantEs sur l’intérieur du camp alors que d’autres ont préféré tout simplement ne pas venir.

Contourner ou affronter l’obstacle ?

Mais cela n’a pas empêché des militantEs de bloquer pendant ce temps-là le centre de rétention de Lesquin, au nez et à la barbe des légions surarmées de l’Etat. Ce dernier exemple montre qu’il est possible, par des stratégies bien pensées, de contourner l’obstacle policier pour frapper là où il ne nous attend pas.

Cela ne signifie pas qu’il faut systématiquement reculer face aux flics. Les fins agitées des manifs contre la précarité en 2006 montraient la colère des manifestantEs et ont contribué à faire reculer le gouvernement sur le CPE. La question du rapport de force se pose encore et toujours ici : il est inutile d’aller s’empaler à quelques unEs sur une meute armée jusqu’aux dents, et c’est d’ailleurs toujours ce qu’espèrent les journalistes quand illes sont là : du sang et des larmes ! Par contre, faire bloc pour ne pas reculer et se faire imposer un parcours fléché quand on est dans la rue, c’est possible.

Bien plus que LA cible à abattre, la police est un obstacle. A affronter, à contourner ou même à ignorer selon les circonstances, mais en aucun cas elle ne doit nous détourner de l’objet principal de nos révoltes contre toutes les formes de domination.


Dans la région, deux militantEs de longue date ont été récemment convoquéEs et interrogéEs dans le cadre de l’envoi d’enveloppes munies de balles d’armes à feu à des responsables politiques. Ces “enquêtes” devaient inclure comme par hasard le fichage total des accuséEs (ADN, empreintes digitales, tests dactylographiques), au prétexte que l’ADN est le meilleur moyen de se disculper ! Dans cette affaire, la Justice a montré qu’elle ne reculerait devant rien pour terroriser les militantEs les plus actifs.


Qu’est-ce que le copwatching ?

Le "copwatching" a été inventé il y a quelques années à Berkeley, en Californie. Cette activité consiste pour les "copwatchers" à espionner les fréquences radio de la police (c’est légal aux Etats-Unis) et à se rendre ensuite sur les lieux d’intervention, caméra au poing. Les copwatchers restent là pendant toute l’intervention des flics et filment, simplement pour pouvoir rendre compte d’éventuels traitements discriminatoires ou de violences de la part des condés. Cette activité permet ensuite de faire connaître à l’"opinion publique" les “abus” de la police. Pas révolutionnaire pour deux sous dans son discours officiel (il s’agirait de faire en sorte que la police se comporte en respectant strictement la légalité), cette pratique peut par contre avoir des conséquences intéressantes : d’abord une main qui se sait filmée s’abattra moins facilement sur la tête de quelqu’unE, ensuite la quantité d’écarts au règlement répertoriés peut amener à prendre conscience du fait que ce que la presse appelle une "bavure" n’est que le comportement normal d’une personne ou d’un groupe qu’on arme et qu’on dote d’un pouvoir démesuré sur d’autres humains... Bref, que la police est dangereuse, inutile, criminelle et qu’elle est l’ennemie de la population !

A Calais, depuis plusieurs années, quelques personnes surveillent et photographient les exactions des flics contre les réfugiéEs et en font le compte rendu sur le site indymedia Lille. Les poursuites dont elles sont régulièrement l’objet démontrent qu’elles dérangent les autorités. Ce boulot de surveillance s’est amplifié suite au camp No Border et à l’annonce de la destruction imminente de la "jungle". A plusieurs reprises, cette pratique a permis d’éviter ou de réduire la violence débridée dont les CRS sont coutumiers à Calais : plusieurs fois les flics sont repartis à l’approche des militantEs. Mais le rapport de force est tellement disproportionné qu’il n’a pas pu empêcher nombre de rafles, de tabassages et de destructions d’affaires personnelles.