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Flicage - Fichage - Social Carnage

mardi 30 septembre 2008


L’État, les collectivités publiques et le patronat imposent de nouvelles armes de contrôle social : multiplication des flics et des vigiles municipaux ou privés, généralisation de la vidéo surveillance, explosion et interconnexion des fichiers, etc. La règle du jeu est presque toujours la même : mesure ultra

provocante vendue pour nous “protéger” ; réaction “citoyenne” contre l’atteinte aux libertés individuelles et collectives ; petit recul des puissances publiques et normalisation in fine d’un nouvel outil de contrôle, ensuite généralisé à l’ensemble de la société. Ne reste plus alors qu’à inventer un énième nouvel instrument.

C’est ce processus qui nous a fait intégrer la présence des bidasses dans les lieux publics depuis 1995, qui a généralisé le prélèvement ADN pour tout délit supposé du moment qu’il ne concerne pas la chose financière. C’est aussi lui qui est à l’oeuvre dans les rebondissements du fichier EDVIGE, toiletté en un clone plus présentable pour le patronat : EDVIRSP.

Tout cet appareillage sécuritaire mis en place par la gauche (LSQ...) et la droite, joue évidemment sur des peurs largement entretenues par les médias de masse. Comme nous sommes en “démocratie”, de pseudo-garanties servent de gardiennes du temple des libertés : le conseil constitutionnel ... et la CNIL elle-même n’est plus aujourd’hui qu’un organisme consultatif alors que les fichiers informatisés se sont multipliés et pénètrent toujours plus loin dans notre intimité. Les promesses apportées lors de l’instauration d’un fichier fondent comme neige au soleil quand ce dernier est en place. Le FNAEG ne concerne plus seulement les terroristes et violeurs récidivistes. Quant à l’effacement total d’un fichier, il est illusoire.

Quelles certitudes avons-nous que les mineurEs qui n’auraient pas/plus commis de délit jusqu’à leurs 18 ans seront effectivement retirés d’EDVIRSP ? Cela dit, pas d’inquiétude, Sarkozy n’énonçait-il pas récemment que le fichage n’était dangereux qu’en dictature ? Bientôt les nouvelles techniques du contrôle seront un gage de répression policée.

L’un des arguments de vente des nouvelles technologies dans le champ de la répression est de pouvoir agir presque en direct contre la délinquance. C’est évidemment un leurre, tous les fichiers et caméras réunis ne peuvent servir qu’a posteriori. En revanche, l’omniprésence des agents et des outils du contrôle social dans l’espace public (et de plus en plus privé) vise à faire peur aux “délinquantEs” potentiels. Plus insidieusement, cela pousse à s’autocontrôler, à intégrer un “flic mental”. “Puisque je ne suis pas sûrE que ce que je veux faire est légal et que je suis surveilléE, alors je ne le fais pas”. C’est là un moyen bien utile d’aseptiser nos comportements, particulièrement quand ils touchent aux luttes sociales. Plus encore, cette normalisation du contrôle et l’intégration, d’une part d’une aspiration à une société pacifiée d’où rien ne dépare, et d’autre part d’une réalité forcément dangereuse, nous pousse non seulement à nous contrôler nous-mêmes, mais aussi à fliquer les autres. On voit donc la délation se généraliser, les “grands frères” patrouiller dans les quartiers, et la violence à l’égard des déviantEs exploser. C’est ce processus que montre le film mexicain La Zona (2008). Un quartier fermé et ultra surveillé, réservé à la bourgeoisie, plonge dans une chasse à l’homme quand trois gamins, pauvres, osent pénétrer dans ce havre de paix et de prospérité.

C’est loin d’être une nouveauté, la logique sécuritaire, dans son discours comme dans sa pratique, cible toujours les pauvres et celles et ceux qui refusent ou contestent l’ordre social établi. C’est d’ailleurs à cela que sert le contrôle social. Aux appareils policiers et judiciaires, il faut aussi ajouter toutes les formes de contrôle informel dans lesquelles, aujourd’hui, les médias de masse jouent un rôle essentiel. D’implicite en explicite on glisse vers de nouvelles normes qui rendent la contestation sociale de plus en plus difficile alors que les nouvelles règles établies favorisent les oppressions qu’elles soient étatiques, capitalistes, patriarcales...

Pour autant, il n’y a pas plus de fatalité au flicage généralisé qu’au capitalisme. Les résistances ne peuvent être cantonnées à un vague humanisme gnangnan. Des instit’ qui refusent de remplir le fichier Base Élèves à celles et ceux qui refusent que l’État prenne leurs empreintes génétiques, la résistance s’organise. A nous de l’amplifier et d’être solidaires face à la justice bourgeoise. Plus encore, c’est à nous d’imposer NOS normes de luttes et d’inverser un rapport de force trop favorable à la régression sociale.